Ce mois consacré à la thématique de « la relation à l’autre » m’a conduit après la relation de couple et l’isolement, à m’intéresser à ce phénomène lié au regard de l’autre sur nous-mêmes. En apparence, ce sujet peut paraître anodin pour beaucoup. Pourtant, la façon dont l’autre nous perçoit, nous comprend, nous considère et nous juge parfois, a un impact déterminant sur notre façon d’être et de faire. Les sujets auxquels cela peut nous renvoyer sont nombreux : timidité, estime de soi, jugement, reconnaissance, confiance en soi, angoisse, etc.
Comment alors mieux comprendre le rôle du regard des autres sur nous-mêmes ? Comment s’en libérer ? Est-il possible de s’en détacher totalement ?
En quoi le regard des autres est si important ?
Depuis la naissance, nous plongeons dans un monde de relations et confrontés au regard de l’autre à chacune de nos actions. L’environnement primaire, dont le nourrisson est dépendant, lui renvoie une réaction lorsqu’il explore et interagit avec le monde qui l’entoure. Très vite, l’enfant intègre que certaines actions sont valorisées là où d’autres provoquent de la désapprobation. Mais, quelle que soit la réponse de l’environnement (positive ou négative), il obtient une reconnaissance de la part de l’autre.
Plus tard, cette idée est confirmée lorsqu’il est amené à multiplier ses interactions, et lorsque d’autres figures d’autorité (nourrice, grands-parents, enseignants, etc.) viennent s’inscrire dans la vie de l’enfant, ou des personnes similaires à lui (frères et sœurs, camarades, etc.). Il intègre ainsi progressivement que les réactions des autres à sa manière d’être et de se comporter vont différer et lui apporter plus ou moins de bénéfices. Pensons, par exemple, à l’importance du look vestimentaire qui peut être une préoccupation majeure pour les adolescents, lié à la mode ou au groupe social dans lequel la personne va se sentir acceptée et reconnue.
Au fil des expériences en société, le regard des autres va naturellement jouer un rôle sur nos relations et notre parcours de vie (amitié, famille, travail, couple, etc.) en nous poussant à nous conformer ou à l’inverse nous distinguer, mais également sur notre façon de nous percevoir. Lorsque le regard de l’autre est trop souvent interprété ou ressenti comme jugeant ou sévère, la confiance et l’estime de soi sont en jeu. De manière inverse, lorsque la confiance en soi est atteinte, le regard de l’autre paraît d’autant plus menaçant.
Timidité et peur du regard de l’autre
Chez certaines personnes, manquant d’assurance ou d’aisance en société, le regard des autres peut ainsi être perçu négativement. Ce ressenti construit sur la crainte (souvent motivée par des expériences de vie éprouvantes, mais aussi sur l’interprétation) de ce que l’on renvoie et du jugement de l’autre. Cela peut se manifester par une anxiété plus ou moins marquée, des rougeurs, tremblements, palpitations lors de situations sociales (voir article sur les troubles anxieux).
En réaction, les personnes affectées vont ressentir une exigence de se conformer aux attentes des autres pour éviter de déplaire, de décevoir, voire de moqueries (quitte à négliger ses propres souhaits et besoins).
Le sentiment d’insécurité produit par cette crainte rend alors la prise de décision difficile à tolérer face à l’appréhension des critiques qui pourraient survenir. L’exigence de performance et de compétitivité, fréquente au sein du milieu professionnel, affecte la perception de soi en donnant la sensation de ne pas être à la hauteur.
Comment alors trouver un équilibre entre cette reconnaissance suscitée à travers le regard des autres et cette difficulté à l’affronter totalement ? Peut-on se libérer du poids du regard de l’autre et est-ce seulement possible de s’en détacher ?
Comment accorder moins d’importance au regard des autres ?
On entend souvent qu’il faudrait prêter moins d’attention à ce que les autres peuvent penser. Cette idée est pourtant loin d’être évidente dans un monde où le regard des autres prend une telle place.
Comprendre l’impact du regard des autres sur soi
Si l’on s’intéresse aux concepts de confiance en soi (lié à nos capacités) ou d’estime de soi (lié à notre valeur personnelle), on peut comprendre que le jugement que les autres portent sur nos actions et nos comportements puisse nous affecter. Pourtant, il ne devrait ni nous remettre en cause ni nous définir en tant que personne, le regard des autres étant naturellement imprégné de leurs expériences subjectives et ne se focalisant que sur ce qu’ils perçoivent ou projettent sur nous sans réellement prendre en compte nos motivations profondes.
C’est davantage nos propres erreurs et les critiques que nous portons sur nous-mêmes qui sont mis en exergue par le regard des autres et nous font ressentir honte, culpabilité, regrets, craintes du jugement, etc. Pourquoi alors ne pas plutôt chercher à s’accepter et être moins sévère avec soi-même afin d’apprendre à mieux supporter le regard de l’autre ? Peut-être devons-nous également aspirer à moins nous positionner dans le jugement vis-à-vis des autres et nous efforcer de mieux les comprendre.
Affirmer sa personnalité et s’entourer des bonnes personnes
Cette élaboration permet de prendre conscience que les relations ne se fondent pas nécessairement sur cette dynamique réciproque du jugement, et s’astreindre à moins d’interprétation quant au regard de l’autre.
Naturellement, une partie de ce que l’on redoute dans le regard de l’autre est basée sur l’interprétation qu’on en fait, c’est-à-dire uniquement des suppositions dans lesquelles nous attribuons à l’autre notre propre système de valeurs. Et dans l’éventualité où cette supposition serait exacte et que l’autre nous juge négativement, avons-nous fatalement l’obligation de nous entourer de cette personne ? Devons-nous (et pouvons-nous) réellement plaire à tout le monde ? Ne pouvons-nous pas nous permettre d’être nous-mêmes, sans avoir besoin de nous oublier ou de prendre l’ascendant sur l’autre ?
Pour aller plus loin, le concept d’assertivité développé par A. Salter, permet de repenser sa façon d’être et de faire, de manière à pouvoir s’exprimer, se défendre et se (faire) respecter sans empiéter sur l’autre.
Cependant, ce travail ne passe pas uniquement par nous-mêmes, mais nécessite de veiller à s’entourer de personnes bienveillantes qui ne sont ni dans le jugement perpétuel ni dans la critique alors même qu’elle n’est pas constructive. L’autre peut aussi se révéler être une source d’encouragement et de soutien pour vous-mêmes et dans la réalisation de vos projets personnels.
Pour aller plus loin (sources) :
https://www.scienceshumaines.com/sous-le-regard-des-autres_fr_2658.html
https://www.cosmopolitan.fr/,qu-est-ce-qui-vous-fait-peur-dans-le-regard-des-autres,1905091.asp
https://leblogduneprovinciale.com/8-conseils-pour-apprendre-a-ignorer-le-regard-des-autres
Graziani, P., & Pedinielli, J. L. (2003). Anxiété et troubles anxieux. Nathan.
Rosset, E. (2018). Se libérer du regard des autres. Jouvence.
Joffrin Le Clerc, C. & Lamagnère, F. (2016). Je n’ai plus peur du jugement des autres. Odile Jacob.